mercredi 14 mai 2008

Ethnopoésie

Calligrammes masora, deux exemples tirés de marges de manuscrits hébreux médiévaux.
Dans la suite de ce que nous disions en mars dernier sur les rapports entre chamanisme et poésie, Charlotte m'a signalé l'existence d'un excellent site internet, ubu, qui comprend une section sur l'ethnopoésie, tenue justement par Jerome Rothenberg, l'auteur/compilateur des Techniciens du sacré. En plus de textes explicatifs sur cette nouvelle discipline qui veut se situer au carrefour entre littérature, musicologie et anthropologie, le site construit par Jerome Rothenberg offre énormément de documentation.
Un "palimpseste néolithique", retranscription d'un décor pariétal, Les trois frères, France.
Des retranscriptions de poèmes, bien sûr, mais également des documents sonores, ainsi que quelques "poèmes visuels", qui vont, avec l'habituel et fécond syncrétisme de Rothenberg, des fresques paléolithiques, témoins d'un mode d'expression dans lequel l'image et l'écrit n'étaient pas encore distincts, jusqu'aux calligrammes de Guillaume Apollinaire, en passant par une représentation kabbalistique de la voûte étoilée sous la forme d'un firmament de lettres éparses.
Un firmament alphabétique sacré, oeuvre de Jacques Gaffarel, kabbaliste chrétien du XVIIe siècle.

Calligrammes d'Apollinaire, début XXe siècle.

Sur la poésie visuelle, Anne-Marie Christin a déjà bien mis en rapport, dans son livre L'image écrite, ou la déraison graphique, les expérimentations des avant-gardes avec les fresques primitives - et avec la calligraphie chinoise, ce que ne fait pas Rothenberg (on ne peut pas tout faire!). L'originalité de Rothenberg se situe donc dans quelques-unes de ses sources - il est allé chercher loin dans le chamanisme contemporain ainsi que dans la religion juive -, et surtout dans sa mise en exergue du matériau sonore des poèmes. Les documents audiophoniques qu'il met à disposition sont de toute beauté, rassemblant poèmes sonores, musiques vocales et litanies religieuses de tous les continents. A déguster.

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