L'anthologie est établie par Nicole Belmont, anthropologue spécialiste du conte oral, directrice d'études à l'EHESS (qui en passant fera partie de mon jury de thèse); et Elizabeth Lemirre, spécialiste du conte de fées littéraire qui a réédité notamment le célèbre Cabinet des Fées, anthologie du conte de fées précieux qui date du 18e siècle.
Sous la cendre est un beau titre pour une anthologie dédiée à Cendrillon. Elle répertorie un certain nombre de variantes du célèbre conte, dont nous ne connaissons souvent que la version Perrault ou la version Grimm. La plus ancienne version de l'histoire serait chinoise, et daterait du 9e siècle après J.-C.
Lointaine héritière des vestales antiques qui gardaient le feu sacré du temple de Vesta, déesse du foyer, la figure de Cendrillon est très dense symboliquement. Associée au foyer en tant qu'espace domestique, elle est également associée au foyer en tant que feu autour duquel vient se construire cet espace domestique. J'en avais déjà un peu parlé ici.
Assistée par une fée marraine dans la version Perrault, par un arbre enchanté souvenir de sa défunte mère dans la version Grimm, Cendrillon à travers ses épreuves et ses métamorphoses se libère de ce qui la lie au foyer. Par le mariage, elle passe d'un foyer à un autre, de son foyer paternel à celui de son futur époux. Ce qui veut dire qu'elle va se défaire de son habit de cendre, s'éloigner de son ancien foyer, et en même temps se débarasser de sa virginité (on fera remarquer que, dans l'Antiquité, les vestales étaient nécessairement vierges).
Sous la cendre couve donc le feu... du mariage, d'un nouveau foyer, et d'une sensualité à conquérir. Le sage Arthur Rackham ne retransmet pas tout cela dans le frontispice ci-dessus, mais l'air inquiet et impatient avec lequel Cendrillon se presse de regarder vers l'extérieur le laisse fortement présager. Il se trouve que ce frontispice en couleurs ouvre un livre qui est par ailleurs totalement illustré de silhouettes monochromes, comme celle ci-dessous, et qui constitue une singulière manière de représenter le conte de Cendrillon.
Hommage à l'imagerie précieuse des contes de fées du 18e siècle, cette utilisation de la silhouette permet également d'insister sur la forme florale de la robe de l'héroïne, qui reste néanmoins ici en bouton. La corolle s'ouvre, à l'inverse, dans l'illustration en 1909 de la version Grimm par le même artiste (le conte arbore alors le nom allemand, Aschenputtel).
1 commentaire:
oh oui cette maison d'édition est fabuleuse!!!! je note je note!!!! ;o)
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