Rien d'absolument exceptionnel pour cette spécialiste des deux philologues allemands, mais j'invite les quelques parisiens que je connais (et que je ne connais pas), qui s'intéressent de près ou de loin au romantisme ou aux contes de fées, à aller boire ses paroles. Elle connaît son sujet sur le bout des doigts. Moi je travaille pour Lire en Fête, et je ne pourrais malheureusement pas être là (mais j'ai déjà eu l'occasion de l'entendre sur le même sujet). Aussi, si vous y allez, saluez-là de ma part, comme ça on verra à quel point mon blog est lu de toute la francophonie. Et puis, pour ceux qui viendront à ma soutenance une semaine après, ça fera une petite mise au point.
vendredi 28 septembre 2007
Les Grimm aux Blancs-Manteaux
Rien d'absolument exceptionnel pour cette spécialiste des deux philologues allemands, mais j'invite les quelques parisiens que je connais (et que je ne connais pas), qui s'intéressent de près ou de loin au romantisme ou aux contes de fées, à aller boire ses paroles. Elle connaît son sujet sur le bout des doigts. Moi je travaille pour Lire en Fête, et je ne pourrais malheureusement pas être là (mais j'ai déjà eu l'occasion de l'entendre sur le même sujet). Aussi, si vous y allez, saluez-là de ma part, comme ça on verra à quel point mon blog est lu de toute la francophonie. Et puis, pour ceux qui viendront à ma soutenance une semaine après, ça fera une petite mise au point.
mercredi 26 septembre 2007
Un grand silence
vendredi 21 septembre 2007
L'Astrée


lundi 17 septembre 2007
En quête des juments de la nuit - 2


Mais revenons à nos lutins.


lundi 10 septembre 2007
La reine des abeilles
En tête du premier volume une illustration pour "The Queen Bee" de Walter Crane, 1882:


"The Queen Bee" est la traduction anglaise du conte de Grimm n°62, connu en traduction française sous le nom de "La reine des abeilles". Le passage représenté constitue la troisième épreuve du héros, après laquelle le chateau sera désenchanté:
"Mais la troisième épreuve était la plus difficile, car il s'agissait de désigner, entre les trois princesses endormies, toutes trois filles du roi, la plus jeune et la plus jolie. Or, elles se ressemblaient absolument, et la seule différence qu'il y avait entre elles était le genre de sucrerie qu'elles avaient mangé juste avant de s'endormir: l'aînée avait mangé un morceau de sucre candi, la seconde avait goûté un peu de sirop, et la cadette avait mangé une cuillérée de miel. Ce fut la reine des abeilles que le Benêt avait sauvées du feu, qui arriva à son secours; elle goûta aux lèvres de chacune des trois princesses et se posa sur la bouche de celle qui avait mangé du miel, permettant ainsi au jeune prince de désigner celle des trois qui était la cadette." (Traduction Armel Guerne)
Cette évocation de princesses endormies, qui de plus se ressemblent comme trois gouttes d'eau, ne pouvait que plaire aux deux artistes anglais, tous deux férus d'art préraphaélite, et notamment de celui de Burne-Jones qui est obsédé par l'imagerie des belles endormies et par la répétition à l'identique des mêmes visages féminins. Ici "The Briar Bower" (tiré de Grimm), par Burne-Jones, une huile sur toile de 1886-1890:
En ce qui me concerne, j'ai choisi également ces deux compositions parce qu'elles renvoient à l'abeille, et que l'abeille est, notamment dans l'antiquité gréco-romaine, symbole d'éloquence, de poésie et d'intelligence. Une abeille vient selon la légende se poser sur les lèvres des grands poètes (Pindare) ou des grands philosophes (Platon). Si une abeille vient se poser sur les lèvres de la cadette, c'est donc certainement pour en faire une porteuse de bonne parole. J'interprète du coup ces trois princesses endormies comme des muses, dont l'éveil est nécessaire afin que le Benêt puisse accéder à l'intelligence et à la parole. Et mieux vaut acquérir une parole de miel qu'une parole sucrée ou sirupeuse...
Intelligence, poésie, éloquence, toutes qualités dont j'aurais personnellement besoin lors de ma soutenance, en espérant que ces trois muses deux fois inscrites en mon(ma) mémoire puissent m'apporter leur appui.
samedi 8 septembre 2007
Dieux américains
Le livre raconte une espèce de nouveau Ragnarok, où les anciens dieux des différentes ethnies des USA, en passe d'être oubliés, sont confrontés aux nouveaux dieux tout puissants mais arrogants des médias, de l'internet, de la voiture, etc. Au milieu des anciens dieux, on retrouve des figures du folklore américain, comme Johnny Appleseed par exemple, ce qui est intéressant dans la mesure où religion et folklore sont en effet indubitablement liés. Il en résulte un commentaire sur les Etats-Unis modernes, mais surtout une réflexion, je pense, sur l'identité nationale américaine, qui s'est construite à partir d'une pluralité culturelle pourtant très rapidement niée au profit de la culture de la technique et de la modernité. Comme très souvent, folklore et identité nationale sont aussi intimement liés que le sont religion et folklore...
Je n'ai malheureusement pas lu le roman en version originale, et je pense que beaucoup d'allusions ont été gommées dans la traduction (le personnage d'Odin qui se fait appeler Wednesday, c'est-à-dire étymologiquement Jour de Wotan, se fait appeler Voyageur dans la traduction française de Michel Pagel...). Je conseille donc évidemment aux amateurs de le lire en VO. Si vous recherchez une "écriture artiste", abstenez-vous, par contre: Neil Gaiman se situe résolument dans un créneau de langue populaire, plein d'argot, de noms de marques, etc. Plus d'informations ici sur ce bon roman très riche d'idées et très vivant.
dimanche 2 septembre 2007
En quête des juments de la nuit - 1
He met the Night Mare and her nine-fold;
Bid her alight and her troth plight
And aroynt thee, witch, aroynt thee."
Traduction de Pierre Leyris et Elizabeth Holland:
Rencontre Cauchemar et ses neuf familiers;
Il le fait prosterner
Pour engager sa foi;
A présent déguerpis, sorcière, déguerpis!"
Pierre Leyris et Elizabeth Holland traduisent "Night Mare" par "Cauchemar" (nightmare en anglais), pourtant Shakespeare, en dissociant les deux parties du mot, nous donne l'indice d'une seconde signification: la "jument de la nuit" (jument se dit "mare", et nuit "night"). Jeu de mot célèbre, qui associe bien la jument qu'on voit sur le tableau de Fuseli avec le cauchemar. Le cheval est un animal psychopompe, traditionnellement associé au monde des morts, ce qui rend le "jeu de mot" plus signifiant encore: ce n'est plus un jeu de mot, mais un retour, semble-t-il, à l'origine étymologique du mot "nightmare". Voila pour le bestiau, dont l'histoire est relativement connue: on retrouve le même symbole de cauchemar dans l'album de bande dessinée de David B intitulé Le Cheval blême, et dans lequel l'auteur raconte (de manière d'ailleurs superbe) ses mauvais rêves.
Néanmoins, il semble que Fuseli n'a pas illustré ce passage de Shakespeare, puisqu'il représente dans son tableau une femme en proie au cauchemar sur sa couche, alors que King Lear parle d'une rencontre en extérieur ("footed thrice the world" pourrait être autrement traduit par "marchait par trois fois à travers le monde") avec "Sir Withold".
Je passe les détails et les différentes possibilités d'interprétation qui ont pu agiter les esprits depuis 1782: référence à un passage du Paradise Lost de Milton, à la Reine Mab telle qu'elle est décrite par Drayton ou par Shakespeare, réminiscence des incubes décrits dans le Malleus Maleficarum, ou bien d'une héroïne des romans pornographiques sadiens, peinture autobiographique à propos d'un amour malheureux du peintre, Anna Landolt de Zurich, etc. Il ne semble pas, comme en témoigne la diversité des interprétations iconographiques, qu'il y ait dans le tableau de Fuseli une référence claire et précise à un passage de Shakespeare, ou à d'autres écrits. Ce qui en fait, en quelque sorte, une peinture d'histoire "sans sujet", ou plutôt sans sujet clairement définissable, se référant à un récit particulier.
Ce tableau semble ainsi plutôt relever de l'allégorie, c'est-à-dire d'une "représentation d'une idée abstraite sous un aspect corporel" (Souriau, Vocabulaire d'esthétique). Et le cauchemar en général est le sujet de cette allégorie, non le cauchemar de quelqu'un en particulier. On a vu que la jument était une référence à une figure traditionnelle du cauchemar, véhiculée par Shakespeare, mais présente dans la mythologie et le folklore: elle a ainsi toute sa place en tant qu'acteur et attribut d'une allégorie du cauchemar. Elle semble même l'incarner.
Le problème réside dans l'espèce de petit lutin: qu'est-ce qu'il vient faire ici?
La suite au prochain épisode. Et l'épisode final un peu plus loin.